Qui ne connaît pas Amsterdam ? Ses canaux, ses coffee shops, ses tulipes. La carte postale, en somme. Et pourtant, Amsterdam ne se réduit pas à ces quelques clichés, provoquant des hordes de touristes dans ses rues.

Oui, il y a trop de touristes à Amsterdam, mais ce n’est pas une raison pour ne pas y aller. Disons qu’il existe des moyens de découvrir la ville autrement, et je vais vous y aider grâce à cet article.

campagne Amsterdam
La campagne n’est jamais loin à Amsterdam

Si vous ne connaissez pas l’histoire de la ville, vous ne pouvez pas comprendre la ville.

Oui, cela paraît idiot comme ça, mais connaître l’histoire de la ville n’est pas forcément une priorité pour les touristes lambda.

Comment appréhender Amsterdam sans comprendre sa guerre sempiternelle contre l’eau ? Sans savoir que c’est là que les premières sociétés capitalistes ont été fondées ? Sans connaître l’impact du commerce de la tulipe, qui fut à l’origine du premier krach boursier du monde en 1673 ?

Tout ce que je vous raconte ici, et bien plus encore, vous pouvez le retrouver au Musée d’Amsterdam situé à l’adresse Kalverstraat 92. Il est effectivement en plein centre, mais paradoxalement… très peu de monde.

Extrêmement pédagogique et bien organisé, cette visite est incontournable pour connaître l’histoire de la ville et ses principales caractéristiques. En plus, cela vous donnera un aperçu de la façon dont les Néerlandais appréhendent leur histoire, entre humilité et auto-critique. Le musée se situe dans un ancien orphelinat et vaut la peine d’être connu. Il abrite aussi une petite terrasse bien agréable d’où vous pourrez goûter à l’art de vivre néerlandais.

La communauté judéo-portugaise d’Amsterdam

Si vous souhaitez poursuivre sur le thème de l’histoire, courez donc au Joods Cultureel Kwartier, le quartier culturel juif.

Au total 5 musées, tous accessibles avec le même billet valable un mois. Les visites les plus recommandées sont le musée et la synagogue. Vous y découvrirez l’étonnante histoire des Juifs portugais d’Amsterdam.

La synagogue portugaise d'Amsterdam
La synagogue portugaise d’Amsterdam

Pourquoi portugais ? Souvenez-vous de vos cours d’histoire.

En 1492, les Juifs sont expulsés d’Espagne. Certains se réfugient au Portugal, en attendant qu’une accalmie leur permette de revenir en Espagne. Hélas, le roi du Portugal – en fait, c’est plus compliqué, mais je résume – décide de les convertir de force au catholicisme. Certains demeurent juifs intérieurement, et ce, sur plusieurs générations ! À partir des années 1600 environ, beaucoup décident de partir pour Amsterdam, qui, libérée du joug espagnol, prône la tolérance et une -relative – liberté de culte. Officiellement catholiques, ils retournèrent au judaïsme et fondèrent ladite « communauté juive portugaise d’Amsterdam » qui participa très amplement à faire de la ville ce qu’elle est aujourd’hui.

Cette communauté est connue parce que le célèbre Spinoza (Espinosa de son nom portugais) en faisait partie. On croit souvent que ce sont les rabbins de la communauté, que l’on imagine comme d’affreux réactionnaires, qui l’en ont expulsé. C’est vrai, mais avec des nuances quand même. Dans les faits, la ville d’Amsterdam acceptait tout réfugié qui voulait bien s’installer… à une condition : qu’il respecte la religion officielle, à savoir le calvinisme. Évidemment, ce n’est pas tout à fait ce que faisait Spinoza, qui fut donc expulsé de sa communauté, puis interdit de séjour à Amsterdam. Ses livres furent, de même, censurés.

Si vous visitez la synagogue, vous constaterez qu’elle a gardé sa structure originelle, c’est-à-dire qu’il n’y a ni électricité ni chauffage.

Un jeudi soir par mois, un concert – souvent classique, parfois jazz – est organisé à la lueur des chandelles. Si vous coïncidez avec l’une de ces dates, allez-y, vraiment. L’atmosphère est absolument étonnante, surtout en hiver, mais apportez des vêtements chauds.

Sur la place entre la synagogue et le musée, vous vous demandez ce que représente cette statue de docker ?

Bonne question. Il faut savoir qu’Amsterdam est la seule ville en Europe à s’être physiquement révoltée contre la déportation des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, alors qu’elle était occupée par les Nazis. C’est ce que l’on appelle la grève de février 41. Initiée par les dockers et les conducteurs de tramway qui refusèrent de transporter les Juifs vers la gare, d’où ils étaient emmenés en camps de concentration, elle s’étendit à la population entière et à d’autres villes des Pays-Bas. Le 26 février 1941, environ 300 000 personnes défilèrent dans les rues d’Amsterdam pour protester contre les lois anti-juives des Nazis. Ce mouvement fut sévèrement réprimé, hélas.

Ouderkerk-aan-de-Amstel

Tout près du quartier juif, si vous prenez la piste cyclable et piétonne à gauche du pont sur l’Amstel, vous arriverez à Ouderkerk-aan-de-Amstel, un charmant petit village situé au sud d’Amsterdam.

Ouderkerk (vielle église en néerlandais) est intéressant pour plusieurs raisons. Tout d’abord, parce qu’il abrite le cimetière de la communauté judéo-portugaise dont je viens de parler. Vous y trouverez, par exemple, la tombe du père de Spinoza et de Menasseh ben Israël, rabbin de la communauté au 17ème siècle et qui œuvra pour le retour du judaïsme en Angleterre après plusieurs siècles d’interdiction.

Le long de l'Amstel
Le long de l’Amstel

Si vous ne souhaitez pas visiter ce site, la visite d’Ouderkerk mérite quand même d’être faite. Déjà, la promenade le long de l’Amstel pour y arriver, une quinzaine de kilomètres, est juste magnifique. Très vite, on arrive dans la campagne et les polders et c’est l’occasion de constater que la campagne aux Pays-Bas n’est jamais très loin. En plus, vous croiserez de vrais Néerlandais, accros à la marche, au vélo et à la navigation. Le mieux, pour y aller, est de suivre les pistes cyclables 56 puis 50. Après le pont de l’autoroute, vous avez le choix entre l’une ou l’autre des rives à pied ou à vélo si vous en louez un.

Le village d’Ouderkerk est tout à fait charmant et je vous recommande de flâner sur une terrasse au bord de l’Amstel. Le bac qui permet de rejoindre les deux rives est classé monument historique, vous comprendrez vite pourquoi !

Bon voyage !

Article rédigé par Rosa Carmon

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