Quand on découvre un pays, il est impératif de s’intéresser à l’histoire du lieu que l’on visite, je crois qu’on est tous d’accord là-dessus. Par contre, l’histoire en elle-même n’est pas forcément réjouissante, mais elle mérite qu’and même que l’on s’y attarde. Il y a beaucoup de périodes sombres dans notre histoire et les camps de concentration de la Deuxième Guerre mondiale en font définitivement partie. Voici comment j’en suis venue à visiter les camps d’Auschwitz en Pologne.


J’avais loué un petit appartement en Cracovie (ou Kraków pour les intimes) afin y passer la semaine. C’était ma première fois en Europe de l’est et cette destination m’est venue sur un coup de tête, tout simplement. Alors que j’étais à la recherche des lieux incontournables à visiter, un nom me revenait sans cesse: Auschwitz.

On ne visite pas ce genre d’endroit par curiosité. Non. On le visite par devoir de mémoire. Pour ne pas oublier, ne jamais reproduire.

Le matin de la visite, j’ai pris un transport privé avec quelques autres personnes en direction de Oświęcim, à environ 1 heure du centre-ville de Cracovie. La route se fait longue, la fébrilité se fait sentir au fil des kilomètres qui passent. Le trajet est silencieux, pesant. Je me demande quelles seront mes premières impressions une fois sur le site, j’appréhende le moment où je poserai mes pieds sur ce sol où tant de gens ont perdu la vie. Je regarde le paysage qui défile sous mes yeux, avec une lenteur surréaliste. Bientôt, nous arriverons au camp d’Auschwitz I, le premier bâtiment à ouvrir ses portes en mai 1940.

«Arbeit macht frei», le travail rend libre.

Je passe moi aussi sous cette arche au sinistre slogan, de la même manière que les prisonniers d’autrefois à la grande différence que, moi, je peux faire demi-tour à tout instant. La visite débute dans l’un des nombreux blocs de détention, les quelques-uns auxquels nous avons accès ont été adaptés en un parcours muséal. Je passe dans différentes pièces qui m’informent sur le traitement des prisonniers détenus dans le camp, je vois leur visage, la date de leur décès. Des centaines et des centaines d’objets ayant appartenu à des gens qui ont perdu la vie ici sont entassés, comme des déchets, sans importance, en piles immondes. Je passe au travers en les regardant, en prenant conscience de l’ampleur de l’Holocaust, enfin, une petite partie… Des piles de souliers, des piles de valises, des piles de cheveux… Je vois des gens prendre en photo tous ces objets, ces objets avec un lourd passé et une histoire bien trop grande pour être contenue. Le contraste me déchire.

Le parcours continue jusqu’à la toute première chambre à gaz, j’entre à l’intérieur. Tout est silencieux, personne ne parle. L’air est saturé, c’est sombre, presque hanté. C’est difficile de croire que tant de personnes ont perdu la vie de cette façon, comme du bétail. Leurs corps brulés en masse par la suite, leurs objets pillés, revendus. Ça donne froid dans le dos, je me demande comment une telle chose a pu trouver sa place dans notre histoire. C’est tellement irrationnel.

En début d’après-midi, nous arrivons au camp d’Auschwitz II, Birkenau. Un centre d’extermination complet, bien structuré, ou plus d’un million de personnes ont perdu la vie. Les baraques s’étendent tout simplement à perte de vue, la vision est inimaginable. Je traverse le vaste territoire en longeant le chemin de fer. Au bout, un gigantesque mémorial a été construit. En plusieurs langues nous pouvons lire:

« Que ce lieu où les nazis ont assassiné un million et demi d’hommes, de femmes et d’enfants, en majorité des Juifs de divers pays d’Europe, soit à jamais pour l’humanité un cri de désespoir et un avertissement. Auschwitz – Birkenau 1940 – 1945 »

Outre ce monument commémoratif, l’ensemble des lieux est resté pratiquement intact suite à la libération du camp à la fin de la guerre en 1945. Quelques baraquements ont été reconstitués, mais en général, le site est resté figé dans le temps et est devenu, au fil des ans, un lieu de recueillement et de commémoration. C’est, en quelque sorte, le plus grand cimetière de l’histoire de l’humanité. Près d’une trentaine d’années après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les camps d’Auschwitz se sont inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO. Ces sites sont visités par des centaines de milliers de personnes chaque année.

Il n’y a pas de mot pour décrire ce que cette visite m’a fait ressentir et prendre conscience. Certes, ce n’est pas une «belle» journée. Par contre, c’est un morceau incontestable de notre histoire que nous devrions tous connaître par respect pour ces victimes. Nous nous devons de nous souvenir de ce qui a été fait dans le passé afin de ne jamais voir revivre de telles atrocités. Si vous allez en Pologne, prenez le temps d’y passer.

Article rédigé par Nuange Poulin

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