Il y a quelques années, j’ai vécu à Berlin. En me baladant et en découvrant la ville et ses quartiers, je suis tombée régulièrement sur l’art de rue ; des graffitis, des stencils, des murales. Depuis, je suis devenue une voyageuse « street-artienne ». C’est mon thème à moi, ma passion. Certains font des croisières sur les îles, d’autres visitent des châteaux ou des vignobles. Moi, mon dada, c’est de chercher les ruelles, les coins cachés où dénicher les plus beaux graffitis ou œuvres de rue en tous genres. Dès que je visite une ville, ma priorité est de googler les mots clés suivants : street art in…

Histoire 101 : Le street art est né aux États-Unis dans les années 60 et a vu le jour dans le métro de New York. Au début, c’était les tags et le street art a longtemps été considéré comme un art de délinquants, comme une détérioration de l’espace public, du vandalisme. Heureusement, le monde évolue et les temps changent. En 2020, dans de nombreux pays, cet art n’est plus considéré comme un crime. Aujourd’hui, l’art de la rue passe des sombres ruelles, des lugubres tunnels aux projecteurs de grandes galeries, on s’arrache même certains graffitis d’illustres artistes.

Alors, après avoir pas mal bourlingué voici ma liste des 10 endroits coups de cœur pour admirer, photographier et en prendre plein les yeux en matière de street art !

Berlin

C’est bien évidemment mon premier choix, car c’est là qu’est née ma passion pour cet art, mais c’est aussi surtout que c’est incontestablement Berlin qui a l’une des plus grandes densités d’artistes en Europe.

Vous trouverez des œuvres – graffitis, pochoirs, collages – dans de nombreux quartiers de Berlin : Kreuzberg, Freidrichshain, Schoeneberg, Prenzlauerberg… en fait un peu partout sauf dans la partie centrale et lisse de la capitale, entre la Porte de Brandebourg et l’île des musées à Mitte.

Si vous n’avez pas beaucoup de temps, des visites guidées autour du street art sont offertes par des guides.

J’ai testé et beaucoup aimé le concept de Alternative Berlin Tours qui allie visite à travers la ville et atelier créatif où on peut réaliser son propre chef-d’œuvre urbain dans un atelier au milieu d’artistes locaux.

Miami

Un seul mot : WYNWOOD !

Wynwood district était il y a une dizaine d’années une succession de hangars, bâtiments de stockage, bref un quartier sans intérêt, que Tony Goldman a su transformer en partie, ayant l’idée d’utiliser ces gigantesques murs en toiles pour les artistes du monde entier. Wynwood est devenu aujourd’hui la Mecque du street art, avec pour point culminant l’événement Art Basel qui a lieu chaque année en décembre. Véritable musée à ciel ouvert, Wynwood est devenu l’un des terrains de prédilection des meilleurs graffeurs mondiaux. Ici, chaque mur, chaque coin de rue, chaque porte est prétexte à une anecdote ou une rencontre insolite. Les Wynwood Walls & Garden sont incontournables. C’est un espace clos où se trouvent des murales renouvelées chaque année lors de la manifestation Art Basel. À l’intérieur de ces « jardins », le public découvre uniquement sur une certaine plage horaire, chaque jour de la semaine, quelques œuvres de grands noms. Préparez-vous, c’est le royaume de l’égoportrait !

Bordeaux

Qui eût cru que la bourgeoise citée du sud-ouest de la France deviendrait l’un des points émergents du street art français? En effet, il est bien présent aujourd’hui à Bordeaux. Grandes fresques et pièces modestes, ostentatoires ou secrètes, que l’on croise inattentif, au coin d’une rue, cohabitent avec les immeubles nobles de la ville.

Mais s’il y a un lieu que vous ne devez pas manquer pour profiter au maximum de l’expérience art de rue c’est Darwin. Le Darwin Camp, c’est l’histoire d’une caserne militaire abandonnée en 2005 qui a pu renaître grâce à l’envie d’association de quartiers qui se sont mobilisées pour créer un nouvel espace urbain créatif. 4 ans plus tard, ce lieu alternatif est né et, de nos jours, de nombreux artistes de street art sont venus « habiller » les anciens entrepôts désertés. Au bord de la Garonne, Darwin Camp est une incroyable bulle de vie, d’effervescence, d’expérimentation. Dès qu’on franchit le grand portail affublé du nom DARWIN, on entre dans un monde à part. Tags, graffitis ou immenses fresques murales à ciel ouvert, le street art a investi les murs des anciens bâtiments pour le bonheur de tous. Vous pouvez également vous rendre du côté des bassins à flots. Près de la splendide Cité du Vin, de belles fresques ont fleuri sur du mobilier industriel des friches et sur les murs! Génial!

Birmingham

Je sais, cette bourgade située dans les Midlands est rarement une destination de premier plan, mais il le faudrait! Surtout en matière de street art! La collection de peintures murales des rues de Birmingham est audacieuse, belle et en constante augmentation. Chaque création est une œuvre d’art magistrale. Grâce aux artistes locaux et aux collectifs d’artistes internationaux, Birmingham devient rapidement un haut lieu du street art créatif et coloré. Banksy y a récemment créé une de ses dernières œuvres.  La nouvelle fresque de l’artiste provocateur a été peinte sur un mur de briques, représentant deux rennes décollant dans les airs, attachés à un banc public où est allongé un vrai sans-abri avec tous ses sacs. Celui-ci personnifiant le Père Noël, son traîneau et ses cadeaux. On comprend le message…

À Birmingham, Digbeth est le site à ne pas manquer! En vous promenant, chaque coin vous permet de découvrir quelque chose de nouveau, presque comme si on était admis dans un club secret. La ville accueille un large éventail d’artistes de rue de renommée mondiale. Allez faites le détour!

Athènes

Berceau de la démocratie, la capitale hellénique offre beaucoup plus que ses antiques sites, ses panthéons et ses ruines. Non loin de ces trésors d’antan, les murs aujourd’hui continuent de s’exprimer librement : tags, graffitis, fresques murales, pochoirs et affiches ont redessiné le paysage urbain, au point de faire de la ville une des capitales du street art mondiales. Le phénomène a pris une ampleur inégalée depuis la crise de 2008. Plus que jamais, les murs se sont mis à raconter le désarroi, la révolte et les espoirs d’une cité traumatisée par une crise économique et sociale qui n’en finit pas. De Plaka, centre historique de la ville à Exarcheia, quartier contestataire d’Athènes, nos yeux sont sollicités pour admirer toutes ces œuvres et réfléchir aux messages politisés.

Athènes est pour moi une des villes les plus empreintes de graffitis et autres, des wagons de métro aux immeubles, en passant par les vans! Tout est bon pour passer ses idées et s’affirmer! Le hashtag #streetartisnotacrime prend ici tout son sens! Il suffit de flâner et de lever les yeux.

Lisbonne

Si vous aimez parcourir une ville et vous y perdre à la recherche de street art, Lisbonne est une bonne destination pour un prochain voyage. La variété des œuvres est juste hallucinante. Entre les artistes locaux et les étrangers, entre les superstars et les artistes en émergence, entre les créations à caractère politique ou purement esthétique, la capitale du Portugal doit être sur votre liste! Qui plus est, la politique touristique de la ville a tendance à mettre ce type d’œuvres à l’honneur. Bravo, enfin certains comprennent!

En manque de temps, faites une balade dans les rues autour du château, près des docks, dans certaines rues de Baixa et du Bairro Alto. Plus de temps, il existe des quartiers entiers pour rendre hommage au street art. Let’s go to EntreCampos et Amadora, ou simplement à la Avenida 24 de Julio. Ces coins sont devenus un festival d’art public pour lutter contre l’exclusion sociale. Les murs entiers des immeubles exhibent des œuvres splendides! J’adore Lisbonne !

Madrid

Les rues de Madrid sont à admirer pour leur architecture, mais aussi pour les œuvres d’art urbain exceptionnelles mouchetant ses barrios, des panneaux de signalisation ludiques et des pièces controversées aux espaces avant-gardistes et aux grandes peintures murales. C’est surtout dans le quartier populaire et cosmopolite de Lavapiés que vous pourrez partir à la rencontre du street art madrilène et décalé! Ce multiculturalisme se reflète dans l’art urbain du quartier.

À Esta es Una Plaza, un jardin communautaire sur Calle Doctor Fourquet 24, on peut admirer les murs extérieurs décorés de motifs vibrants célébrant les nationalités du monde. Une grande partie de l’art de rue à Lavapiés est politique et engagée. D’autres bons spots ; les quartiers branchés de Chueca et Malasaña. Mais encore une fois, le lieu à ne pas louper est le centre culturel La Tabacalera, ancienne fabrique de cigares, aujourd’hui lieu atypique qui fait la promotion de l’art sous toutes ses formes. À la fois un centre d’exposition et de street art.

Kiev

Il n’y a pas encore si longtemps, on n’entendait pas ou très peu parler de Kiev. Aujourd’hui, la capitale ukrainienne s’est imposée sur la map comme on dit. Le street art a fait son apparition et se développe à une vitesse grand V. Des artistes invités de tous horizons et pays ont déjà créé plus de 150 peintures murales sur les murs des bâtiments faisant enfin revivre les constructions grises et sombres de style soviétique.

Bethléem

Depuis le début de sa construction, le mur de séparation est un véritable espace d’expression où Palestiniens et étrangers donnent libre cours à leur colère et leur désir de paix. Des graffitis ont ainsi fleuri sur ce mur que ses détracteurs ont rebaptisé « le mur de la honte ». Les graffitis se concentrent principalement sur les portions du mur qui divisent Bethléem, Qalqilya, le village de Qalandiya à 11 km au sud de Ramallah. À Bethléem, pour les inconditionnels de Street Art et les fans de Banksy, l’hôtel Walled Off ouvert par le grand maître en 2017, offre des chambres à la géniale déco et donne sur le triste mur érigé depuis la deuxième Intifada.

Montréal

Et pour finir, notre métropole pour ne pas se montrer trop chauvin. Montréal est ma ville. Sans cesse en effervescence, les œuvres apparaissent, disparaissent, se modifient, s’enrichissent. Depuis une vingtaine d’années, l’art urbain fait partie intégrante de l’identité montréalaise, grâce aux créations d’artistes locaux et internationaux qui ont laissé leur art sur nos façades pour le plus grand plaisir de nos yeux. Contrairement à d’autres grandes villes, le street art à Montréal ne se concentre pas dans quelques quartiers. Chez nous, on trouve de l’art urbain un peu partout.

Le plateau Mont-Royal, le boulevard Saint-Laurent et ses rues adjacentes sont à parcourir et à photographier sans modération! L’ancienne usine Canada Malting dans le quartier Saint-Henri est à visiter ainsi que  l’arrondissement de Rosemont La Petite-Patrie au niveau du métro Beaubien.

Deux événements mettant en valeur l’art de la rue sont des rendez-vous à ne pas manquer :

Under Pressure, festival annuel, est le plus vieil événement du genre à être organisé en Amérique du Nord. Nous sommes des précurseurs !

MURAL, festival annuel d’envergure internationale, s’est donné pour mission de démocratiser l’art urbain et réunit des millions d’intéressés avec une belle brochette d’artistes invités du monde entier.

Bon vous aurez compris qu’ici comme ailleurs il faut oser sortir des sentiers battus. Cet art parfois éphémère est partout et surtout dans les lieux de notre quotidien, dans les rues, avenues, stationnements, mais pas que… n’hésitez pas à également emprunter les ruelles.

Ouvrez les yeux, levez la tête et bonne chasse aux trésors!

Article rédigé par Deux Québécois autour du monde

À lire également sur Nomade Magazine :