Au microphone, on annonce la descente vers l’aéroport de San José, l’avion vibre sous l’effet de la sortie des roues, les lumières de la ville se dessinent tranquillement dans le noir une par une.  Le nez dans le hublot, j’observe le spectacle.

You’re coming back home Elisa.

Le Costa Rica fut mon premier amour, sa nature luxuriante, ses montagnes verdoyantes et, surtout, son peuple tant charmant et chaleureux.

C’est hier soir que j’ai fait étamper ma 5e entrée dans le pays. En sortant de l’aéroport, je laisse derrière moi d’un pas décidé toutes les voix des chauffeurs qui me disent « Taxi, Taxi Lady, Taxi Baby, Taxi, Taxi! ». No gracias, je sais où je m’en vais et je me sens bien confiante de montrer que je connais le chemin.

Les locaux me parlent anglais, je leur réponds en espagnol, j’aime leur dire à quel point j’adore leur pays et que je continue d’y revenir parce que c’est ici que je me sens bien. Je n’accepte pas qu’on me vende les choses à un prix de touriste, car il y a un bout de temps que je ne suis plus touriste ici. Je n’ai pas ce sentiment d’être une étrangère, mais plutôt celui d’être là où je dois être, chez moi.

Retrouver les sauveteurs avec qui je travaillais deux ans plus tôt, être super pressée de parler à l’un d’entre eux pour lui montrer fièrement que maintenant je parle espagnol et qu’enfin on pourra discuter ensemble. Revoir ces gens qui m’ont tant appris, aidé et accueilli chaleureusement chaque fois que je revenais promener mes pieds sur le sable de leur plage, quel bonheur! Quelle joie d’avoir de si précieuses amitiés ailleurs dans le monde! Quelle joie de débarquer dans un autre pays et de se sentir chez soi, heureuse et complète!

Dans les derniers trois ans, j’ai accumulé 11 étampes dans mon passeport et pourtant je n’ai visité que 3 pays. « Ah ouais, juste 3? » Beaucoup de gens me disent que si j’avais fait un pays différent chaque fois, j’aurais vu beaucoup plus, j’aurais exploré beaucoup plus, j’aurais mis les pieds sur plus de continents…

Peut-être vrai, mais je n’aurai connu un pays que quand j’aurai vu toutes ses couleurs, ses moindres merveilles cachées loin des zones hôtelières, vu le beau comme le moins beau, vécu le mode de vie des locaux et échangé avec eux.

Pour moi, voyager n’est pas une question d’en faire toujours plus, mais de profiter à fond de ce qui s’offre à nous. Ce n’est pas d’accumuler le plus de pays possible ou de dire que j’ai visité la France, la Grèce, l’Argentine, le Chili et le Belize en passant par le Guatemala l’an dernier. Le voyage n’est pas une question de temps, ni un nombre d’endroits différents où on a mis les pieds, c’est une question d’aventure, d’expérience, d’apprentissage sur soi et sur le monde, d’ouverture et d’accomplissements.

Pour moi, voyager c’est découvrir, comprendre, s’ouvrir, se lier d’amitié avec les gens d’ailleurs, partager avec eux, s’intéresser à leur culture tout en leur faisant découvrir la nôtre.

Voyager c’est partir, mais aussi revenir. Revenir chez soi peu importe ou ce  « chez soi » est situé  sur la carte du monde.

La magie du voyage n’est pas que la découverte de paysages, d’eaux plus turquoises les unes que les autres ou encore faire le plus de tours qu’on nous propose, non. La beauté du voyage est avant tout l’amitié, le contact humain. Et, pour moi, revenir dans un pays des années plus tard et serrer dans mes bras ces mêmes personnes avec qui je partageais des moments de folie les années précédentes vaut beaucoup plus que d’ajouter un nouveau pays sur ma liste.

Quand j’ai booké mon vol Mexique – Costa Rica à la dernière minute, j’ai eu l’impression de réserver ma place sur un avion pour rentrer chez moi. Retrouver ma famille, ma plage, mes montagnes, ma maison, mes frères lifeguards avec qui je partageais toutes mes journées dans la tour de surveillance et le sentiment est absolument magnifique.

Je n’ai peut-être pas fait 11 pays différents ces dernières années, mais j’ai appris à m’ouvrir et à m’imprégner d’une culture qui n’est pas celle d’où je viens, j’ai appris à parler une troisième langue pour communiquer avec le peuple, j’ai appris que l’amitié n’a pas de distance et qu’elle est intemporelle et que, même si sur mon passeport c’est écrit Canada, ma maison c’est là où je me sens chez moi.

Dans un monde où on veut toujours en faire plus, il est si bon de ralentir, de prendre le temps, de profiter de chaque petit moment.  D’être présent dans ce que l’on vit et de sentir toute la force de l’univers à l’intérieur de soi, de réaliser qu’on est vivant, qu’on est là ici et maintenant, alors que d’autres n’ont pas eu cette chance et, heureusement, le voyage m’aide chaque fois à retrouver cet état d’être, à me remplir de gratitude pour ce que j’ai sans pour autant avoir à en demander toujours plus.

Travel is a journey, not a destination -Ralph Waldo Emerson

Article rédigé par Élise Bernier

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